Presse

Cosy Mountain N°54

December 29, 2022

LA CACHETTE, UN HÔTEL HISTORIQUE DEVENU MODÈLE DE RÉNOVATION

Demain, avec l'application de la loi ZAN, les constructions d'hôtels neufs seront quasi impossibles, en montagne comme ailleurs. Il deviendra dès lors impératif de réhabiliter et rénover l'ancien… A l'image de l'hôtel La Cachette. Eric Belluardo, co-fondateur du groupe Friendly hotels nous présente ce modèle du genre.

Eric Belluardo, le Groupe Friendly Hotels est spécialisé dans l'hôtellerie de montagne ?

Oui, cet hiver, nous ouvrons l'hôtel La Cachette à Arc 1600. C'est le troisième établissement repris par le groupe depuis 2019, après Le Totem à Flaine et le Victoria Lodge à Val d'Isère.

Pourquoi avoir porté votre choix sur La Cachette ?

Il s'agit d'un hôtel et d'un bâtiment emblématique des Arcs, à la fois par son histoire et son architecture.Au fil des rénovations, l'esprit des architectes de la station avait disparu. Nous avons souhaité lui redonner son caractère historique et patrimonial. La station des Arcs se situe sur la commune de Bourg-Saint-Maurice, commune qui a opté pour une politique de transition vers la zéro artificialisation des sols. La rénovation fait partie des enjeux climatiques et de la transition. Pour Friendly, c'est une évidence d'utiliser les mètres carrés existants.

L'emplacement est également important ?

En effet, le site se situe à l'arrivée du funiculaire reliant la gare de Bourg-Saint-Maurice à Arc 1600. Cela représente la destination la plus « bas carbone » pour aller skier, au départ de nombreuses grandes villes (Paris, Londres, Bruxelles, Lyon...). La problématique du dernier kilomètre est ainsi gérée, avec un trajet confortable (en funiculaire).

Comment avez-vous adapté le bâtiment aux attentes de la clientèle d'un hôtel 4* ?

Nous avons transformé un hôtel club de niveau 3*, non rénové depuis 25 ans. Il n'était pas possible de changer la taille des chambres. Dans les plus petites trames, les chambres cabanes, nous avons tourné le lit face à la vue et la tête de lit fait office de bureau. Ces cellules de 18 m2 plaisent en raison de cette originalité et deviennent plus agréables à vivre. En rez-de-chaussée, nous avons réalisé une extension en gagnant de l'espace sur la terrasse extérieure, supprimant en même temps un couloir de circulation vitré. L'ensemble devient un lieu commun pour le bar, la restauration et l'espace de coworking. Pour le confort thermique, beaucoup de menuiseries extérieures sont remplacées. Le chantier va s'étaler sur plusieurs années à a fois pour des raisons économiques et pratiques, car la façade en porte-à-faux est plus difficile d'accès. Le chauffage était déjà en mode vertueux, grâce à la chaufferie centrale biomasse des Arcs (en énergie bois). Nous avons amélioré l'acoustique de l'hôtel : isolation phonique des ascenseurs, remplacement de portes palières...Chaque chambre est désormais munie d'un bouton « save the planet », le petit nom donné par Friendly Hôtel à l'interrupteur général.

À chaque étape des travaux, vous veillez à adopter une démarche environnementale ?

Oui, c'est une démarche assumée du début à la fin, du chantier jusqu'à l'exploitation de l'hôtel. 100% des entreprises choisies pour les travaux viennent de la région. Une seule n'est pas du département, mais de Grenoble. Nous avons opté pour des matériaux bruts, comme le bois de mélèze ou le foin compressé. Les rideaux des chambres proviennent de la filature Arpin, c'est un budget certes, mais cela nous tenait à cœur et apporte du cachet. Dans la même idée, nous avons opté pour du mobilier de seconde main (provenant du fournisseur Selency, spécialisé dans le mobilier chiné). Pour l'exploitation, nous utilisons de l'eau filtrée, nous avons sélectionné des machines à café aux capsules compostables et nous interdisons les tomates en hiver tout comme les contenants individuels en chambre... On ne peut pas tout faire parfaitement, mais nous avons vocation à progresser.

Lors de la rénovation, vous avez conservé des éléments ?

Nous avons essayé de jeter le moins possible. Une partie du mobilier a été réutilisée afin d'améliorer les chambres du personnel, une autre a été vendue. Les tables de nuit, buffets et autres lampes ont rencontré pas mal de succès. Pour la collecte de déchets, nous avons fait appel à l'entreprise savoyarde Trialp.

En matière de décoration, quelle atmosphère vouliez-vous donner à ce bâtiment imaginé par Charlotte Perriand ?

Nous avons demandé à l'agence Patriarche de moderniser l'espace, en faisant entrer la montagne, la nature et la lumière à l'intérieur du bâtiment. Les baies vitrées ont été agrandies. Le lounge décline les couleurs du paysage, un camaïeu de vert, de gris et d'ocre. Les hôtes se retrouvent autour d'une nouvelle cheminée centrale. Le sol, comme celui de tous les espaces communs, est recouvert de courbes de niveau, un motif emprunté à la carte IGN du territoire. Nous ne voulions pas d'un hôtel au ski, mais d'un hôtel à la montagne car nous serons ouverts en hiver et en été, avec un prolongement de juin à septembre.

Un projet de rénovation est-il moins coûteux qu'une construction neuve ?

Contrairement aux idées reçues, ce n'est pas le cas. Une rénovation, c'est plus complexe. D'un point de vue technique, il y a des découvertes en permanence. Par exemple, nous n'avons pas deux salles de bain identiques. Pour l'économie du projet, nous avons respecté des coûts à la chambre, et nous obtenons un bilan économique très proche de celui d'un projet neuf.

1er décembre 2022